L’UFC-Que Choisir de la Manche alerte sur le manque de places et demande la création d’un droit opposable
Alors que les conditions d’accueil des enfants dans les crèches ont récemment fait l’actualité et légitimement scandalisé l’opinion publique, l’UFC Que Choisir de la Manche rend publics les chiffres de l’offre de modes de garde des jeunes enfants dans le département, qui montrent que de trop nombreux parents doivent soit subir des restes à charge élevés, soit renoncer à les faire garder. En conséquence, l’association appelle les pouvoirs publics à créer d’urgence un droit opposable à un mode de garde des jeunes enfants, qui soit de qualité et abordable.
Point sur les capacités d’accueil dans la Manche
Dans la Manche, 75.5 % des enfants de moins de 3 ans sont couverts par un mode de garde formel (assistants maternels, crèches, ou encore salariés à domicile), ce qui classe notre département à la 9e place en France métropolitaine (moyenne nationale de 58,8 %) ce qui n’est pas si mal (1). Mais cela signifie que malgré tout, dans notre département 2 jeunes enfants sur 10 n’auraient pas pu être accueillis par un mode formel si leurs parents l’avaient souhaité. Quelle possibilité de choix laisse t’on véritablement aux parents (2) ?
En se focalisant sur les deux principaux modes de garde, on constate que dans notre département les assistantes maternelles constituent le mode d’accueil majoritaire avec 57.3% des places pour 100 enfants, devant les crèches avec 11.3% des places pour 100 enfants (contre 41,3 pour les assistants maternels et 20,8 pour les crèches au niveau national)(1).
le choix du mode de garde : des conséquences économiques majeures sur les familles
L’état de l’offre d’accueil a de déplorables conséquences économiques pour les ménages. D’une part, l’absence de solutions pour faire garder leurs enfants à un impact direct sur l’emploi ou l’employabilité des parents (souvent les mères), les privant ainsi de ressources salariales. D’autre part, le type d’offre disponible joue sur le pouvoir d’achat, puisque les restes à charge (sommes effectivement payées après toutes les aides, dont notre étude relève la complexité et le manque de lisibilité) sont en moyenne systématiquement supérieurs en ayant recours à un assistant maternel plutôt qu’à une crèche, à plus forte raison pour les ménages les plus modestes (3).
Une évolution inquiétante pour la Manche
Indépendamment des aspects financiers, le fait que le département de la Manche se repose majoritairement sur les assistants maternels pour l’accueil formel des jeunes enfants pose un réel problème, puisque les agréments d’assistants maternels y sont en chute libre : -718 assistantes maternelles entre 2016 et 2020 (1). Même si le nombre d’enfant a très légèrement baissé, le manque d’assistante maternelles devient de plus en plus inquiétant. Qu’on en juge : de 4836 assistantes maternelles en 2013, 10 plus tard, ce nombre passe à 3749 !
L’accueil par les assistants maternels, grand oublié des politiques publiques
Dans ce contexte, l’absence d’annonces concrètes des autorités concernant les assistants maternels est particulièrement alarmante pour la Manche en termes de perspectives pour les années à venir.
Ainsi, pour éviter un effondrement du taux de couverture, il faudra soit attirer suffisamment d’assistants maternels vers cette activité en la professionnalisant et suscité la création de nouvelles structures , soit ouvrir des crèches en nombre suffisant, pour compenser l’érosion démographique de la profession4.
Des discours non suivis d’effets
Depuis 2007, la création d’un droit opposable à un mode de garde pour les jeunes enfants et d’un service public de la petite enfance ont continûment été promis par les présidents de la République successifs ( 200 000 places promises dès 2007, une promesse renouvelée il y a peu de temps)
Pourtant, depuis quinze ans, aucune réforme d’ampleur n’a été entreprise quant à la qualité de l’accueil. Ainsi, en avril 2022, faute d’attractivité des métiers de la petite enfance, 17 des postes en crèche dans le département de la Manche étaient vacants depuis plus de trois mois.
Des mesures nouvelles sont à prendre, un droit nouveau est à instaurer
Au vu de l’urgence, l’UFC Que Choisir de la Manche attachée à la liberté de choix des parents et au bien-être des enfants, exhorte le Gouvernement à :
– Créer un droit opposable à un mode de garde pour les jeunes enfants, ainsi que cela a déjà été officiellement annoncé, un droit qui soit abordable pour tous, et de qualité. Pour que ce droit soit effectif, il est en particulier impératif de mettre en place un pilotage des besoins sur la base de projections démographiques, tant des naissances que des départs en retraite des professionnels du secteur ;
-Instaurer un pilotage par l’État de l’ouverture de crèches publiques et maisons d’assistants maternels dans les zones les plus déficitaires ;
– Simplifier les aides aux ménages ;
-Systématiser la mise en place de guichets uniques pour trouver un mode de garde.
1 Source : calculé à partir des données de la CNAF, de la DREES, l’observatoire de la petite enfance
2 Au niveau national pour 37 % des parents qui gardent leurs enfants, il s’agit d’une solution par défaut.
3 A titre d’illustration, au niveau national, un ménage gagnant 3 SMIC aura en moyenne un reste à charge mensuel de 282 euros si son enfant est gardé en crèche, contre 342 euros s’il est par un assistant maternel. Pour les ménages vivant avec 1 SMIC, le reste à charge est en moyenne de 56 euros par mois si l’enfant est gardé en crèche, contre 178 euros s’il l’est par un assistant maternel, soit plus du triple.
4 Au niveau national, environ 120 000 partiraient à la retraite à horizon 2030, soit 44 % des effectifs.